eros2019

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La mesure de la parallaxe par Eros

Qu’est-ce que
la parallaxe solaire ?

D’une façon générale, la parallaxe peut être définie
comme la différence entre les directions d’un corps
observé depuis deux points de vue différents.

La parallaxe solaire est la parallaxe horizontale du Soleil. C’est un petit angle d’un grand triangle rectangle céleste ayant le rayon de la Terre comme côté opposé et la distance entre les centres de la Terre et du Soleil comme hypoténuse. La connaissance de cet angle fixe donc la distance au Soleil – pourvu que l’on connaisse le rayon terrestre. Cette distance est baptisée unité astronomique et représentée par le seul symbole au.

La parallaxe solaire
figure 1 – la parallaxe solaire.

La parallaxe p d’un corps céleste est la différence entre la direction d’un corps céleste M vu depuis le centre de la Terre C et celle où il est vu par un observateur P situé à la surface de la Terre. Si le corps se trouve au zénith Z du lieu, la parallaxe sera nulle. S’il se trouve à l’horizon au point M’, sa parallaxe sera maximale et prendra la dénomination de parallaxe horizontale. Crédits P. Descamps

Toutefois, pour être complètement rigoureux, la parallaxe solaire n’est que la forme abrégée de la parallaxe horizontale équatoriale du Soleil. Compte-tenu de la forme aplatie aux pôles de la Terre, c’est le rayon équatorial qui intervient dans la définition de la parallaxe solaire (figure 2).

De plus, la distance de la Terre au Soleil varie constamment, de sorte que c’est sa valeur moyenne qui est prise en considération. Il en va bien évidemment de même pour tout autre corps céleste, planètes ou étoiles.

Ainsi, quand nous disons que la parallaxe horizontale de la Lune est de 57ʹ, cela revient à dire que le diamètre de la Terre vu depuis le centre de la Lune présente une taille angulaire apparente égale à deux fois cette valeur, soit 1,9°.

Définition de la parallaxe horizontale équatoriale du Soleil
figure 2 – définition de la parallaxe horizontale équatoriale du Soleil, plus simplement appelée « parallaxe solaire ».

Crédits P. Descamps

Nous connaissons également les distances des différentes planètes au Soleil sous la forme de proportions entre elles qui n’ont que peu changé depuis les temps historiques de Copernic et Kepler, de sorte que la mesure d’une seule de ces distances donne immédiatement la connaissance de toutes les autres, et, par conséquent, la taille du Système solaire.

C’est pourquoi la détermination de la parallaxe solaire peut être obtenue à partir de la mesure de la parallaxe de n’importe quel corps du Système solaire, dès lors que l’on connaît le rapport des distances relatives à la Terre du corps considéré et du Soleil.

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Les grandes oppositions de Mars ou quand tout n’est qu’une question de point de vue

Se servir de Mars pour connaître la distance au Soleil,
quelle drôle d’idée !

Et pourtant, les travaux de Kepler ont considérablement amélioré la connaissance des proportions qu'ont entre elles les tailles des orbites des planètes. Ainsi, si l’on réussit à déterminer ne serait-ce qu’une seule distance dans le Système solaire, toutes les autres en découleront automatiquement.

Pour ce faire, la grande proximité avec la Terre de la planète Mars fait de celle-ci le candidat idéal. Les grandes oppositions périhéliques de Mars du 8 septembre 1672 et du 14 septembre 1751 seront ainsi mises à profit successivement par Jean-Dominique Cassini (1625-1712), puis Nicolas-Louis de Lacaille (1713-1742).

Les grandes oppositions périhéliques de Mars

Mars peut s’approcher de la Terre à une distance près de trois fois plus petite que la distance Terre-Soleil. Il suffit alors de mesurer la parallaxe de Mars dans ces moments très favorables pour en déduire la parallaxe du Soleil par le rapport des distances respectives à la Terre 0,38/1,0 (figure 3).

Comme la parallaxe de Mars est environ trois fois plus grande que celle du Soleil et est supérieure à l’incertitude (10") des instruments de mesure de la fin du XVIIe siècle, sa mesure en est grandement facilitée.

Calcul de la parallaxe solaire à partir de celle de Mars lors de son opposition périhélique
figure 3 – principe du calcul de la parallaxe solaire à partir de la parallaxe de Mars lors de son opposition périhélique.

À ce moment, la distance entre la Terre et Mars est 0,38 fois celle de la Terre au Soleil.
La parallaxe horizontale de Mars (α) est donc 2,7 fois plus grande que celle du Soleil (π),
ce qui la rend accessible aux instruments de mesure. Crédits P. Descamps

Cependant, ces configurations avantageuses ne se produisent qu’à des moments précis et relativement rares. Ces opportunités correspondent aux oppositions périhéliques de Mars qui se produisent lorsque la planète se retrouve en opposition avec le Soleil vis-à-vis de la Terre, tout en étant au voisinage de son périhélie, le lieu de son orbite le plus proche du Soleil. La conjugaison de ces deux circonstances permet à la planète de se trouver également au plus près de la Terre à une distance d’environ 50 millions de kilomètres de la Terre (Δ = 0,373 au
au plus proche), ceci grâce à la grande excentricité de l’orbite de Mars.

Les oppositions périhéliques de Mars reviennent tous les 15 ou 17 ans.
Le rapprochement de la Terre avec le périhélie de Mars se produisant le 27 août
de chaque année, une opposition de Mars – les oppositions simples ont lieu
en moyenne tous les 780 jours ou 26 mois – proche de cette date sera donc
très favorable.

Comment mesurer la parallaxe de Mars ?

Plusieurs observateurs se répartissent si possible le long d’un même méridien, chacun mesurant la différence de déclinaison entre Mars et une étoile de référence lors de leur passage par le méridien du lieu (figure 4). La parallaxe en déclinaison sur le méridien est alors donnée par la formule suivante très simplifiée (hypothèse d’une Terre sphérique), z étant la distance zénithale et h la hauteur :

p𝛿 = p sin (𝜑 – 𝛿) = p sin z = p cos h

Cette fois-ci, la méthode sera optimisée si les stations d’observations sont le plus éloignées possible l’une de l’autre, l’idéal étant que leur différence de latitude atteigne les 180° pour maximiser la parallaxe en déclinaison.

Alors que Cassini et Rømer vont observer à Paris, Jean Richer est envoyé à Cayenne – par 5°
de latitude Nord – pour faire l’observation correspondante. Par comparaison des différences
de hauteurs méridiennes entre Mars et l’étoile ψ du Verseau relevées les 5, 9 et 24 septembre 1672, Cassini trouve, par le calcul, que leur distance angulaire est plus grande de 15" à Paris qu’à Cayenne. Ce résultat implique une parallaxe horizontale de Mars de 25,6", ce qui donne celle du Soleil à 9,5".

Méthode des déclinaisons
figure 4 – méthode des déclinaisons.

Observations simultanées du 14 septembre 1751, entre Wargentin à Stockholm (φ = 59°21' et z = 68°14') et La Caille au Cap (φ = – 33°55' et z = 25°). La différence de déclinaison de Mars constatée est de 31,9" – c’est la somme des deux parallaxes en déclinaison p𝛿1 et p𝛿2 qui, prises individuellement, demeurent inconnues. La parallaxe de Mars s’obtient alors en divisant cette différence en déclinaison par la somme des sinus des distances zénithales méridiennes mesurée – soit 1,3513 dans le cas présent, ce qui donne une parallaxe de Mars p = 23,6" et une parallaxe solaire de 9,09" (Δ = 0,385). Crédits P. Descamps

La grande excentricité de Mars (0,093) aura en définitive permis à Kepler de déterminer la forme générale des orbites célestes, puis à Cassini et d’autres par la suite, sa distance à la Terre et plus généralement le dimensionnement complet du Système solaire. Nous devons donc beaucoup à cette planète dans l’évolution des idées sur le système du monde.

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Les passages de Vénus
devant le Soleil

Une poignée d’années après la grande opposition de Mars de 1672, un jeune astronome anglais, d’une assurance conquérante,
va proposer une toute nouvelle méthode pour déterminer
la parallaxe solaire.

Il ne le sait pas, mais sa méthode va passionner les astronomes du monde entier pour les deux siècles à venir. Elle sera le ferment d’aventures plus extraordinaires les unes que les autres, par-delà les mers et les terres, au plus fort des guerres. Pourtant, les espoirs immenses placés en elle ne seront pas pleinement récompensés. La précision visée devait être inégalée, et inégalable par tout autre moyen : 0,01" de degré tout au plus. Cet homme est Edmund Halley (1656-1742), sa méthode est celle des passages de Vénus devant le Soleil.

C’est un nouveau mythe prométhéen que Halley nous promet, celui où Vénus et Apollon seraient réunis pour quelques heures afin de donner aux hommes la connaissance des dimensions et des distances de leur Système solaire.

Calcul de la parallaxe solaire à partir du passage de Vénus devant le Soleil
figure 5 – principe général simplifié du calcul de la parallaxe solaire à partir du passage de vénus devant le soleil.

Par le chronométrage du passage à partir de deux endroits éloignés sur Terre A et B, on en déduit la longueur des trajectoires apparentes sur le disque solaire. En utilisant la propriété des triangles VAB et VXY ainsi que la 3e loi de Kepler, le rapport AB/XY est connu (de l’ordre de 0,39). Il suffit alors de connaître la longueur AB pour en déduire la longueur XY. Celle-ci mène ensuite au diamètre solaire qui, rapporté à son diamètre angulaire apparent, donne alors la distance Terre/Soleil et donc la parallaxe. Crédits P. Descamps

figure 6 – principe de l’observation du passage de vénus.

Seuls les contacts intérieurs b et c sont datés, car jugés plus précis que les contacts extérieurs. Le déplacement apparent de Vénus se fait à une vitesse angulaire de 4' par heure. La durée maximale d’un passage est donc de 8 heures pour un passage central (en admettant une taille apparente du Soleil de 32'). Crédits P. Descamps

En définitive, quatre passages seront observés, deux au XVIIIe siècle, en 1761
et 1769, et les deux suivants au siècle suivant, en 1874 et 1882. Les mesures
de parallaxe issues des observations de 1761 sont décevantes, elles se rangent entre 8.28" et 10.60". En 1769, l’accord d’ensemble est meilleur. Cependant,
les mesures s’étalent encore entre 8.50" et 8.88". L’incertitude était très loin
des 0.01" attendues par Halley ; la précision du chronométrage ne pouvait se faire à mieux qu’une seconde, mais se montait plutôt à une vingtaine de secondes,
voire une minute !

En 1822, Johann Encke (1791-1865), de l’Observatoire de Berlin, reprend toutes les observations du passage de 1761 à l’aide de la toute nouvelle méthode des moindres carrés et ses équations de condition introduite par son compatriote Carl Friedrich Gauss (1777-1855) en 1809. Il arrive à une valeur de 8,531 ± 0,062". En 1824, par la même méthode, il traite les observations de 1769, d’où il tire une valeur de 8,603 ± 0,046".

De ces deux passages, il conclura une valeur de 8,578 ± 0,046", qu’il rectifie une dernière fois en 1835 à 8,571 ± 0,037". Cette valeur perdurera pendant près de trente ans.

Les passages suivants de 1874 et 1882 ne permettront pas d’améliorer notablement le résultat, en dépit des efforts humains et technologiques consentis pour garantir une meilleure précision.

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Eros enflamme les astronomes

Découvert le 13 août 1898 par l’astronome Gustav Witt, Eros allait bientôt enflammer l’enthousiasme des astronomes...

Une petite planète de grand intérêt

Eros excite l’intérêt des astronomes pour deux raisons principales :

  • la première tient dans son demi-grand axe de 1,46 au et son orbite fortement excentrique (e = 0,222) qui fait d’Eros le corps pouvant alors se rapprocher au plus près de la Terre ;
  • la seconde résulte dans sa forte variation d’éclat lorsqu’il fait un tour entier sur lui-même en 5 h 16 min.

Egon von Oppolzer (1869-1907) découvre ainsi en 1901 qu’Eros peut perdre jusqu’à 75 % de sa lumière (1,5 magnitude) au cours de sa rotation. Le 20 février 1901, l’observation d’une double variation lumineuse de l’astéroïde Eros conduit Charles André (1842-1912), astronome à l’observatoire de Lyon, à le comparer à ce qu’il appelle « les étoiles doubles photométriques à variation lumineuse continue ». Il entreprend alors une campagne intensive d’observation d’Eros et aboutit à la conclusion que la courbe de lumière de l’astéroïde est tout à fait semblable à celles des étoiles β Lyre et U Pégase (figure 7).

Il en déduit que l’oscillation double de la courbe de lumière est due, comme pour ces étoiles, à une forme ellipsoïdale assez accentuée et en grande partie à des occultations successives et réciproques de deux corps lumineux très voisins se mouvant autour de leur centre de gravité commun.

Plus intriguant encore : la variation de son éclat. En effet, intensivement observé, l’éclat de la petite planète varie de façon capricieuse ; cette variation est tantôt insignifiante, tantôt impressionnante. On finit par comprendre que tous ces « caprices » lumineux tiennent à sa forme très allongée et à la position dans l’espace de son axe de rotation vis-à-vis de la Terre.

Son survol en 2000 par la sonde spatiale NEAR (Near Earth Asteroid Rendezvous) révélera effectivement une géométrie complexe avec une forme très allongée.

Courbe de lumière synthétique de rotation de l’astéroïde (433) Eros
figure 7 – courbe de lumière synthétique de rotation d’eros.

L’aspect de la rotation d’Eros est montré pour chaque maximum et minimum d’éclat
de la courbe de lumière. Crédits P. Descamps

Les grandes oppositions périhéliques d’Eros

Revenons au sujet qui nous intéresse, la parallaxe solaire. Eros était l’objet céleste pouvant se rapprocher au plus près de la Terre, à une distance minimum de 0,15 au (22 millions de kilomètres), soit trois fois plus près que ne peut le faire Mars (figure 8). De plus, l’aspect télescopique d’Eros est quasi ponctuel, à la différence de Mars qui présente un petit disque apparent ; les positions d’Eros peuvent ainsi être mesurées avec beaucoup plus de précision. Eros constitue donc le candidat idéal pour une triangulation de sa position dans l’espace à partir de la Terre, c’est-à-dire pour une détermination de sa parallaxe trigonométrique.

Pour en conclure la parallaxe solaire, il suffit d’exprimer la distance mesurée en kilomètres de la Terre à la petite planète en unités astronomiques, telle que la mécanique céleste nous la fournit à partir de la troisième loi de Kepler.

Détermination de la parallaxe solaire à partir de celle de l’astéroïde (433) Eros
figure 8 – principe de la méthode de la détermination de la parallaxe solaire à partir de la connaissance de celle d’Eros.

Crédits P. Descamps

Toutefois, ces rapprochements serrés ne peuvent se produire qu’au voisinage d’une opposition périhélique. Il faut pour cela qu’Eros se trouve très près de son propre périhélie (point de son orbite le plus proche du Soleil), qui a une longitude héliocentrique de 122°, et que la Terre n’en soit pas éloignée également. Ceci ne peut se produire que lorsque la Terre passe par cette même longitude, ce qui a lieu le 22 janvier de chaque année.

Cependant, ces grandes oppositions périhéliques de la planète Eros sont rares, elles ne se reproduisent que tous les 40 ans environ avec une récurrence intermédiaire de 7 ans (plus précisément en 1931, 1975, 2012 et 2056).

La première campagne d’observations intensives est déclenchée durant l’hiver 1900-1901, dont le résultat fut la détermination d’une parallaxe solaire de 8.806 ± 0.004" conclue par Arthur Hinks (1873-1945) en 1910.

Mais une opposition encore plus favorable se profilait déjà à l’horizon, celle de l’hiver 1930-1931. Sous les auspices de la jeune Union astronomique internationale (UAI), 23 observatoires se mobilisent pour réaliser pas moins de 2847 clichés de la planète avançant au beau milieu d’étoiles de repère. À nouveau, il faudra 10 ans pour en venir à bout.

Ce n’est qu’en 1941 que Spencer Jones (1890-1960) annonce le résultat final : 8.790 ± 0.001", ce qui donnait pour l’unité astronomique une valeur de 149 674 000 ± 17 000 km.

Les rapprochements serrés d’Eros sont de nos jours des opportunités éducatives mises à profit pour renouveler le calcul de la parallaxe solaire par la méthode trigonométrique (c’est-à-dire par triangulation). Le retour d’Eros au plus près de la Terre en janvier 2012 (0,15 au) a donné lieu à une vaste campagne internationale. Bien que le prochain rapprochement serré (opposition périhélique) ne se produise qu’en 2056 (0,15 au), celui de janvier 2019 – pour ceux qui ne pourront attendre jusque-là – reste digne de considération également.

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Echo radar sur Vénus

Vers la fin des années cinquante, avec l’apparition de l’astronomie radar non passive liée aux exigences de précision astrométrique de la conquête spatiale, une nouvelle méthode va s’ouvrir pour déterminer l’unité astronomique – ou, ce qui revient au même, la parallaxe solaire – avec une précision inégalée. La cible : Vénus à sa conjonction inférieure.

Commencées au MIT (Massachusetts Institute of Technology ), la technologie et la méthode vont atteindre leur forme la plus aboutie avec le JPL (Jet Propulsion Laboratory à Pasadena, fondé par le physicien Von Karman avant la Seconde Guerre mondiale) et les grandes antennes de Goldstone. La méthode des échos radars sur Vénus permet de mesurer la distance de la Terre à Vénus par mesure du temps d’aller-retour d’une onde radio envoyée sur Vénus. La connaissance de la vitesse de la lumière et de la distance Terre-Vénus exprimée en unités astronomiques permet la détermination de celle-ci en kilomètres.

Les ondes radio peuvent pénétrer l’atmosphère terrestre à partir de longueurs d’onde ayant quelques millimètres à près de 100 mètres. Elles induisent alors un léger courant électrique dans un conducteur tel qu’une antenne. Comme les miroirs paraboliques, les antennes paraboliques collectent et rassemblent les ondes radio en leur foyer, où un petit courant est créé et amplifié. L’intensité des ondes radio est très faible comparée aux ondes visibles. Par conséquent, il est nécessaire de disposer de grandes antennes.

Quand fut construite la station du JPL, la méthode était différente de celle du MIT ou de Jodrell Bank en Angleterre. La station est située à Goldstone, dans le désert de Mojave, à 300 kilomètres à l’est de Pasadena (figure 9) ; elle est pourvue de deux antennes de 26 mètres de diamètre, l’une pour l’émission à la fréquence de 2388 MHz (ou onde de 12,6 cm de longueur), et l’autre pour la réception, de masers comme détecteurs et d’horloges atomiques.

Au lieu d’envoyer dans l’espace un train d’impulsions discrètes, c’est une onde continue à une fréquence beaucoup plus élevée qui est envoyée.

L’antenne AZ-EL de la station de Goldstone du Jet Propulsion Laboratory
figure 9 – L’antenne AZ-EL de 26 mètres de diamètre de la station de Goldstone du Jet Propulsion Laboratory.

Cette antenne a été utilisée en couplage avec l’autre antenne HA-DEC pour détecter l’écho radar de Vénus en 1961. Crédits Jet Propulsion Laboratory

Deux jeunes étudiants faisaient de la réussite des tirs sur Vénus le succès de leur thèse, Duane Muhleman et Richard Goldstein. La pression était forte, surtout après les échecs récents du laboratoire Lincoln. Leur directeur de thèse leur résuma ainsi l’enjeu  « No Echo, No Thesis ». Ils construisirent chacun un système de traitement du signal et se partagèrent le temps d’antenne.

Mulheman en particulier construisit un instrument capable de mesurer le décalage Doppler-Fizeau. En effet, l’onde radar qui est envoyée voit sa longueur d’onde modifiée lors de sa réception au retour du fait du déplacement dans l’espace de la Terre et de Vénus.

Cet effet Doppler-Fizeau est fonction des positions et vitesses de la Terre et de Vénus sur leur orbite respective. Par conséquent, sa mesure constitue un autre moyen d’accéder à la valeur de la parallaxe solaire.

Après un an de travail, l’antenne fut tournée vers Vénus pour la première fois le 10 mars 1961. Le signal aller-retour mettait environ 6,5 minutes pour parcourir les 113 millions de kilomètres de distance. 238 heures de données radars seront enregistrées jusqu’au 10 mai 1961.

Dès le premier essai, Goldstein vit bouger l’aiguille de l’ampèremètre qui mesurait le signal du récepteur. Il observait pour la première fois en temps réel l’écho d’une planète qui lui répondait !

Le signal était très faible, sa puissance ne dépassait pas les cinquante milliwatts, petits résidus du long voyage de l’onde de 13 kilowatts de puissance qui était partie de l’antenne de Goldstone. L’affaiblissement du signal était de 260 000 fois. Muhleman publia en 1962 dans The Astronomical Journal une valeur de l’unité astronomique de 149 598 500 ± 250 kilomètres, soit une parallaxe solaire de 8,794185 ± 0,000015".

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La parallaxe solaire de nos jours

De nos jours, la parallaxe solaire n’est plus mesurée. Sa valeur découle directement de celle de l’unité astronomique (au), puisque la parallaxe solaire est définie comme étant « l’angle sous lequel est vu un rayon équatorial terrestre à la distance d’une unité astronomique ».

Mais au fait qu’est-ce que l’unité astronomique ? Elle est communément admise comme étant la distance moyenne Terre-Soleil. Ce n’est pourtant pas le cas. Ce n’est d’ailleurs pas une définition qui la fixe, mais une convention.

Il n’y a plus de définition de l’unité astronomique. Ne dites plus qu’elle est égale à la distance moyenne Terre-Soleil. Bien sûr, tout a été fait pour que la transition définition/convention se passe en douceur, mais dès maintenant, dites plutôt :

« par convention, depuis 2012, l’unité astronomique est fixée à la valeur exacte de 149 milliards 597 millions 870 mille 700 mètres »

Comme le rayon équatorial de la Terre vaut ae = 6 378, 136 3 km (IERS, 1992), on en déduit la parallaxe solaire : π = arcin(ae /au) = 8,794 142 8".